Ce fameux mythe de la minorité m’a énormément hantée depuis ma tendre enfance. Je devais être la bonne jeune fille vietnamienne : calme, docile, timide, être à ses affaires, avoir de bonnes notes à l’école, ne pas faire de vague… Je devais avoir un parcours impeccable afin de faire honneur à ma famille. J’ai surtout ressenti que je n’ai pas le droit à l’erreur lorsque je côtoie les groupes dominants. Et si j’en faisais, je brisais l’image qu’on se fait d’une personne asiatique.

J’ai remarqué que je n’ai pas le droit de vivre des émotions de colère, mais seulement sourire. Je n’ai pas le droit de remettre en question les incidents racistes que je vivais, car je devenais la personne problématique qui « cherche des bibittes » au sein du groupe et qui n’est pas solidaire avec ses pairs. Lorsqu’on me dit des propos discriminatoires tels que : « Tu parles vraiment bien en français. », « Tu es belle pour une Asiatique. », « Tu es toute petite et mignonne comme une poupée geisha. », « C’est normal que tu aies de bonnes notes, tu es Asiatique ! », « Vous les Asiatiques, vous êtes le bon peuple qui ne crée pas de troubles comme les autres. »… Ça semble être des compliments n’est-ce pas ? Hélas, non ! Parce que derrière desdits compléments se cache tout un système d’oppression. Un fantôme sur lequel nous avons de la difficulté à épingler des mots, car ce n’est pas un sujet appris en classe ou enseigné par nos parents. Pourtant, je vis cette expérience quotidiennement. Ces propos résonnent jusque dans mon âme, car cela me rappelle chaque fois qu’une partie de mon identité est différente, qu’on me traite différemment des autres. Et que mon identité ethnique sert à divertir. Au final, notre seul désir est d’être reconnus selon notre individualité et d’avoir les mêmes opportunités que nos pairs blancs et que l’on puisse également reconnaître que pouvons être des Asiates imparfaites*.

*Je vous invite à écouter le podcast bilingue Asiate imparfaite de mon amie Laura Nhem qui discute avec différentes personnes sur leurs expériences personnelles en tant qu’Asiatique au Québec.