Mon nom est Marilyn Butler. Je suis une femme adoptée chinoise. Je commence à décortiquer les éléments qui composent mon identité.

J’ai accumulé plusieurs expériences sexistes et racistes dans mon parcours. À 27 ans, je réalise que les propos à caractère sexuel que j’ai reçus m’ont affectée au point de s’inscrire dans les mouvements de mon corps. Jusqu’à récemment, j’avais honte de mes formes et je faisais tout pour prendre le moins de place possible. Je crois qu’avoir l’identité de femme adoptée asiatique m’a obligée à relever de nombreux obstacles pour m’affranchir d’un cadre contraignant et dévalorisant.

Je comprends avec le mythe de la minorité modèle qu’à l’extérieur de l’image de « l’Asiatique parfaite » on n’arrive pas à saisir les dimensions de notre vécu et par conséquent il est très difficile d’avoir le soutien dont on a besoin.

Le mythe de la minorité modèle je le vis à chaque fois que l’on discrédite la pensée des personnes asiatiques sur une problématique sociale. Si l’on se fie à la perception générale, « la personne asiatique » ne possède aucune expertise pour s’exprimer sur quelconque sujet. Comme si les sujets comme la discrimination, le colonialisme, la pauvreté, la gentrification, l’écologie, le racisme ou la dépression ne nous concernaient pas. À mes yeux, il ne fait aucun sens que la culture actuelle dominante ait démontré si peu d’intérêt pour l’histoire des communautés asiatiques. Comment se fait-il qu’avec une histoire d’immigration de 400 ans sur les continents américains on se demande encore ce que font les personnes asiatiques « ici » ? Mes études en sociologie à l’UQAM n’ont pas aidé à remplir ce vide historique. Au contraire, j’avais des enseignant.es qui dépeignaient l’histoire de l’immigration asiatique avec des données fausses et stéréotypées qui invisibilisaient toute mobilisation, contestation et implication sociale des communautés asiatiques. J’ai appris plus tard que c’est une histoire entière que l’on efface lorsque l’on ne prend pas connaissance de déshumanisation et de la fétichisation des corps des personnes asiatiques. Pourtant, saisir ces expériences nous informerait sur l’histoire du racisme et de la discrimination envers les immigrant.es.

Mon message est d’inviter tout le monde à faire le travail d’aller à la rencontre des personnes immigrantes asiatiques et des personnes adoptées avec une posture d’ouverture et d’alliance. Nous avons beaucoup à dire sur les dynamiques sociales et nous pouvons contribuer à ouvrir des débats sociaux importants.